La section cinéma du festival de l’histoire de l’art est conçue en écho aux nombreux autres événements autour du pays invité, le Portugal et du thème annuel, l’animal. Imaginée pour tous les publics, sa programmation proposera d’ouvrir un espace de parole et de regard, porté par des films et des cinéastes. Réunissant films courts et longs, fictions, documentaires, films d’artistes, œuvres vidéo et cinéma d’animation de toutes les époques, cinéastes connus et méconnus, grands classiques et œuvres inédites en France, elle se veut attentive à la façon dont le cinéma accueille et fait voisiner en son sein tous les autres arts. Les séances offriront quelque trente rendez-vous : dans les salles du cinéma Ermitage de Fontainebleau, à deux pas du château, des projections de films, introduites par des critiques et des spécialistes ou suivies de rencontres avec des cinéastes, artistes, acteurs et actrices, chercheurs et chercheuses ; dans les nombreux autres lieux du festival, une table-ronde et des conférences-projections pour ouvrir encore à d’autres sujets.

Longtemps resté méconnu autant à l’intérieur qu’en dehors de ses frontières, le cinéma portugais recèle pourtant un grand nombre d’œuvres éminemment importantes pour l’histoire de l’art. Parcourir sa richesse en une douzaine de séances permettra de découvrir les identités qui composent le pays, les ressorts de son histoire, comme les figures emblématiques de sa culture et de sa société.

Plusieurs titres mettront en lumière le travail de restauration et de conservation effectué par la Cinémathèque portugaise, notamment à travers des classiques de la production nationale (une comédie populaire, La Chanson de Lisbonne de José Cottinelli Telmo ; un mélodrame chanté, Fado de Perdigo Queiroga), deux documentaires tournés pendant et après la Révolution des œillets (un film d’intervention politique, Les Fusils et le Peuple ; un poème à visée anthropologique, Trás-os-Montes de Margarida Cordeiro & António Reis), et un film phare de la nouvelle vague des années 1960 (Les Vertes années de Paulo Rocha). L’œuvre majeure de Manoel de Oliveira sera envisagée par ses deux extrêmes (son tout premier film Aniki-Bóbó et l’un de ses tout derniers, L’Étrange affaire Angelica), et également avec l’un de ses titres les plus incontournables, Val Abraham, présenté par l’un de ses comédiens fétiches, Luís Miguel Cintra, invité d’honneur du festival.

L’inventivité de la génération des cinéastes ayant émergé durant les années 1990-2000 sera également célébrée : l’occasion de (re)découvrir la radicalité formelle des films de Pedro Costa (Le Sang, sous réserve), Miguel Gomes (Tabou), João Pedro Rodrigues (L’Ornithologue) et surtout Teresa Villaverde, invitée d’honneur du festival qui proposera une masterclass et accompagnera son film Contre ton cœur. Enfin, Maria de Medeiros, autre invitée d’honneur du festival, viendra présenter l’un des films qu’elle a réalisé (Capitaines d’avril) et l’un de ses plus récents en tant que comédienne (L’Ordre moral de Mario Barroso).

C’est le temps d’une quinzaine de séances que seront abordées les manières dont l’animal (qu’il soit âne, brebis, chien, léopard, lion, ours, singe, vache… ou représentant d’espèces encore si méconnues) a été appréhendé au cinéma. La programmation fera se côtoyer documentaires et fictions, mais aussi des films jouant des frictions entre l’un et l’autre.

Plusieurs documentaires donneront à voir de fascinantes expériences revisitant autant les frontières entre l’homme et l’animal que leurs espaces de cohabitation (Grass de Cooper & Schoedsack, Koko, le gorille qui parle de Barbet Schroeder, Grizzly Man de Werner Herzog). D’autres approcheront la représentation de la mort (La Chasse au lion à l’arc de Jean Rouch, Un animal, des animaux de Nicolas Philibert). Une séance entière sera consacrée au court métrage mythique de Georges Franju, Le Sang des bêtes, sur lequel l’écrivaine et collagiste Muriel Pic viendra poser son regard, avec deux de ses propres films (En regardant le sang des bêtes et Bêtes en miettes).

Du côté du cinéma le plus contemporain, Emmanuel Gras (sous réserve), Christine Baudillon et Elsa Maury accompagneront les trois bouleversants documentaires d’immersion qu’ils ont réalisés, au plus près de la vie animale, de son intelligence et de sa sensibilité (respectivement Bovines, Animal Pensivité et Nous la mangerons, c’est la moindre des choses). Les trois cinéastes reviendront sur la douceur et la profonde attention qui caractérisent leurs approches respectives lors d’une table ronde exceptionnelle. Deux autres artistes et cinéastes contemporains viendront également à la rencontre du public : Etienne de France présentera Tales of a Sea Cow, une fable étonnante, tour à tour troublante et fascinante, qui remet en question nos interprétations du langage animal ; et Nicolas Boone offrira avec Bonheur un réjouissant portrait composite de Rosa Bonheur, artiste engagée, radicale et moderne.

Parallèlement, plusieurs fictions aborderont la porosité entre humanité et animalité (L’Impossible Monsieur Bébé de Howard Hawks, La Belle et la Bête de Jean Cocteau), proposeront une série de rencontres avec la singularité du regard animal (Inde, terre mère de Roberto Rossellini, Au hasard Balthazar de Robert Bresson) ou comme autant d’invitations à repenser nos modes de relation au vivant (Wendy & Lucy de Kelly Reichardt, Princesse Mononoké de Hayao Miyazaki).

Plusieurs séances élaboreront également des rapprochements inédits, favorisant le dialogue entre les œuvres et les formes : de courts films expérimentaux (notamment deux films de l’artiste Marie Losier) entreront parfois en résonance, en pré-programme, avec les longs métrages, dans un geste de « montage » propre à stimuler la réflexion.

Enfin, un volet jeune public s’intéressera à la représentation de l’animal dans la littérature jeunesse par deux de ses plus importants auteurs, Leo Lionni (Le Petit monde de Léo de Giulio Gianini) et Gabrielle Vincent (Ernest & Célestine de Stéphane Aubier, Vincent Patar et Benjamin Renner).

La Belle et la Bête de Jean Cocteau
Histoire naturelle du cinéma : de quelques animaux virtuels
Cinéma
Contre ton cœur de Teresa Villaverde